Morceaux de vie | |
Topic visité 6 fois Dernière réponse le 20/05/2004 à 00:25 |
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Voilà donc l'heure de vous (re)raconter mon enfance, ma rencontre avec Idril et ma vision de son mariage... |
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La petite famille de Tristram s’était installée dans une petite vallée verte et difficile d’accès. Ils s’y étaient installé depuis plus de vingt ans déjà, sans avoir rencontrer de difficultés particulières.
Les récoltes avaient été bien maigres cette année et le gibier rare. L’hiver venu, Tëtram et son frère aîné partaient de plus en plus loin pour trouver des traces de quoique ce soit de vivant. Jusqu’au jour ou ils tombèrent sur des nains, armés d’arbalètes et de lances. Le vent couverait les bruits, la neige tourbillonnait de tous cotés… Le chaos causa de lourdes pertes chez les nains, peu habitués au combat dans la neige. Ils réussirent tout de même à emporter dans la mort le frère de Tristram. Celui-ci brûla tous les corps une fois le combat achevé. Ce fût un beau combat et il rentra seul ce jour-là. Il était si marqué qu’il en épargna le vieux cerf aux bois usés qu’ils pourchassaient à peine deux hures plus tôt. La vie reprit son cours, le soleil sa course, les saisons leur danse. Bien des neiges plus tard, très loin de là, une guerre impitoyable faisait rage. Les Dieux se battaient. Les enfants de la Terre se mourrait chaque jour un peu plus. La Terre gémissait. Les guerriers de toutes races se déchaînaient, portés par les chants des Dieux, portant haut leurs couleurs. Les terres étaient brûlées, les corps mutilés et les rivières souillées par le sang de multitudes. Le vent passait de village en village, portant les maladies et l’odeur fétide de la mort. Partout, le feu destructeur et si capricieux rongeait chairs et habitations… La Terre se fit entendre. Elle fit pleuvoir pour éteindre les flammes et purifier les eaux, Elle souffla autant qu’elle pouvait pour chasser les nuages souillés et les colonnes de fumée noires. Puis elle gronda. De ses entrailles, des créatures fabuleuses, cauchemardesques sortirent. Certaines rampaient, d’autres volaient ou sautillaient mais toutes voulaient faire cesser cette guerre. Des alliances furent scellées, d’autres brisées, mais le sang coula encore des jours et des nuits. Ou que se posa l’œil, des corps inertes, déchiquetés. Le festin des corbeaux. C’est pendant l’un de ces terrifiants grondements de la Terre que la vie de Tristram bascula. A quelques dizaines de mètres de la cabane familiale, une faille s’agrandit, sembla se déformer en un rictus démoniaque. L’heure n’était plus à la clémence. Une créature issue des temps primordiaux s’était éveillée, son sommeil séculaire interrompu par les plaintes de la Terre. En sortant de la montagne, tel un ver immonde s’extrayant d’un fruit trop mur, elle brisa la roche. La mère de Tristram n’eut pas le temps de se mettre à couvert… Elle aurait du mourir, mais la créature la protégea de ses ailes membraneuses. Pas pour la sauver, non. Pour la dévorer vivante. Son père projeta sur la créature des carreaux de son immense arbalète, pendant qu’il cherchait sa lance. Les carreaux mordaient la chair, mais ne semblaient pas empêcher le monstre de finir son repas, sous les yeux du père. La suite n’est qu’un ramassis de souvenirs confus : une gerbe de feu, le père faisant bouclier de son corps, des griffes, des cris, et un nuage de poussière… Alors que Tristram l’étreignait, au bord de l’épuisement, son père mourut dans ses bras. La douleur le paralysait. Il était marqué par la créature, sur presque tout le corps -hormis la tête, le haut du torse et un bras. Il me fit la promesse de venger ses parents. Pour cela, il fallait empêcher les guerres, pour que la Terre ne montre pas sa colère à nouveau, afin que les abominations du passé restent en sommeil. Il retrouverait cette créature et la tuerait, un jour. La marque qu’a laissé sa lance dans son torse et en est le serment. Tristram se leva à grande peine et prit le corps ensanglanté de son père dans ses bras. Son bras gauche le faisait atrocement souffrir, mais il refusa de céder face à la douleur. Une fois debout, le monde se mit à tourner, l’air devint glacial et le corps dans ses bras se fit encore plus lourd. Il réussit à garder l’équilibre, livide et déterminé. La cabane, qui avait supporté les vents et la neige pendant des années, était fumante et s’était effondrée sur elle-même. Le petit potager s’était transformé en un tapis de braises, qu’il traversa, sans mot dire, sans avoir la force de crier ou de pleurer. Crier pour qui de toute manière ? Il était seul maintenant. Il amena le corps près de la cabane, et s’écroula une première fois. Il voulut se relever mais dû renoncer à cause de la douleur. Elle se manifestait à chaque seconde, à chaque battement de cœur. Ses membres gourds ne voulaient plus lui répondre, il sombra dans une sorte de demi-sommeil. Il essaya de ne pas dormir, de ne pas mourir. Au milieu de la nuit, le rougeoiement des poutres et l’odeur de bois brûlé étaient tout son monde. Un bien petit monde, mais c’était son monde. Il se réveilla, noir de suie, rouge de sang. Maintenant, il souffrait vraiment. Sa tête reposée, l’agonie était insupportable, il ne parvint même pas à se retourner sur le dos, et sombra dans un tourbillon de détresse, toussant à cause des cendres qu’il avait avalées. A nouveau au bord de l’éveil, il aurait préféré mourir que d’endurer cela, mais il se leva cette fois-ci. Meurtri, il réussit à porter son père sur les derniers mètres. Il l’immola sur les restes de la cabane, près de sa femme qui n’avait pas quitté ses côtés en près de cinquante ans. Il partit sitôt que ses jambes purent le porter, sans attendre que le feu ait tout consumé. Il ne voulait se souvenir que des flammes… De sa vie passée, il n’emporta que sa lance brisée et l’arc que son père devait lui donner lorsqu’il serait adulte. « On ne devient adulte qu’après avoir appris à perdre » lui avait dit son père. Tristram cessa d’être un enfant en ce jour maudit. Il laissa dans cette petite vallée sauvage sa vie, ses sentiments, son nom. Il devint Tetram le mercenaire en ce quinzième jour du premier mois. « A un moment, tout devient feu… » |
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Après des années d‘errance guerrière, Tetram avait perdu le goût du sang. Il en aurait presque oublié ses motivations s’il ne voyait pas tous les jours ses marques de brûlure. Cette peau parcheminée qui l’élançait parfois, comme pour lui rappeler cette journée de flammes.
On l’avait engagé pour attaquer un camp de chasseurs elfes, des sauvages, des tueurs. Un simple travail… Le calme ne rassurait en rien les mercenaires géants. Au contraire, ils s’étaient étonnés d’arriver si près du village sans rencontrer la moindre résistance. La tension montait ; ils étaient près en cas d’embuscade… C’est alors que quelques elfes sortirent des maisons, armés d’épées simples et d’arcs. Le combat fut brutal, sans finesse, ni merci. Les géants étaient suffisamment nombreux pour affronter ce petit camp de guerriers. Mais, des elfes qu’ils affrontaient, seuls quelques-uns uns savaient réellement manier les armes. Les géants montaient bientôt de maison en maison porter la mort, sans qu’aucun ne se pose de questions. Les mercenaires font ce pourquoi ils sont payés, rien de plus. Seul Tetram, troublé par un souvenir de ses parents, n’avait pas laissé la fureur le submerger. Il se battit comme les autres mais il sentait que quelque chose n’allait pas. Il entra dans une hutte faite de bois et de lianes tressées, cela n’avait rien d’une demeure de guerrier. C’est alors qu’il comprit d’ou venaient les cris aigus. Il vit deux enfants, une femme et un homme... Les deux amants se jetèrent sur lui dans un dernier élan de courage insensé. Il était resté ébranlé alors que la vérité prenait forme et c’est un coup de poignard au ventre qui le sortit de sa torpeur. Ils succombèrent sous les coups du géant, qui avait frappé par purs réflexes. Tetram ne pansa pas sa blessure, pas plus qu’il ne sortit chercher de survivants. Les cris se multipliaient et mourraient dans le village. Il resta un long moment, le regard fixé sur le cadavre des deux garçons. Ils avaient été tués par leurs parents pour éviter qu’ils ne soient revendus comme esclaves, qu’ils soient tués par les monstres qu’ils étaient ou bien pire… Il espérait que tous les enfants avaient connu le même sort ou bien qu’ils aient fui à travers la forêt. Mais l’attaque à l’aube et l’encerclement leur laissait peu d’espoir. Tetram annonça qu’il quittait la bande dans la soirée. Les autres ne lui posèrent pas de questions. Ils n’en posaient jamais. Son commanditaire était une sorte de noble Olympien, mais avec un port militaire. Il accompagnait la troupe, attendant à l‘écart. Il paya Tetram et se dit qu’il ne le reverrait plus jamais. Il avait tort. Tetram suivit la troupe qui prenait le chemin du retour, lorsqu’un groupe d’elfes et d’hommes sauvages attaqua… Le combat ne fut pas facile mais les géants plus lents à réagir, tombaient les uns après les autres. Seul l’Olympien parvint à s’échapper, pris d’une peur panique, il fit demi-tour et se retrouva nez à nez avec Tetram… rencontre fatale. Si sa tête ne revenait pas à Tetram, elle lui serait utile. Les elfes n’eurent aucun mal à retrouver les traces du géant, et s’apprêtèrent à tirer sur lui lorsqu’ils virent ce qu’il tenait à la main. Aucune parole ne fût prononcée. Tetram plaça la tête au bout d’une lance qu’il ficha dans le sol. Les elfes le laissèrent partir, à la surprise du géant. Il marcha la tête baissée pendant de longues minutes, au pas lent, puis se mis à courir aussi vite qu’il le put. Cette expérience marqua Tetram profondément. Il se maudit d’avoir fait tant de mal au nom de la force qu’il cherchait, pour venger ses parents. Il avait mal choisit sa voie, il s’était perdu… C’est cet épisode, qui rendit sa rencontre avec Idril si troublante. Il avait un grand projet en cours et avait déjà quelques amis lorsqu’une jeune elfe se présenta. Elle avait perdu sa famille elle aussi et cherchait de l’aide. Tetram lui proposa d’être son ami et protecteur, offre qu’elle accepta joyeusement. Ils firent donc la promesse de ne jamais se séparer et de veiller l’un sur l’autre…Tetram avait le sentiment de bien faire et ça ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Il lui offrit un pendentif en souvenir d’une expérience partagée, d’un songe étrange et prirent la route de ce qui allait être Sigdil. La turbulente enfant en vint même à l’appeler « papa ». Ce qui n’était pas sans émouvoir le géant. Il voulait lui enseigner les rudiments du maniement à l’arc et le respect de la nature mais elle savait déjà tout de cela, alors elle s’amusa à faire l’enfant et à rêver. Le géant, un peu bourru, ne savait pas trop comment réagir avec cette si petite elfe ; tant il était parfois tourmenté de remords en se remémorant le passé… Pour s’occuper en chemin, ils se racontaient leurs projets et décidèrent d’ouvrir une auberge dont Idril serait la serveuse. Idril n’était pas complètement heureuse pour autant, il lui manquait quelque chose, quelqu’un…C’est alors que Rincewind, l’homme sauvage fit irruption dans sa vie… |
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Tout avait été soigneusement préparé. Le banquet avait été réalisé avec grand soin, les vêtements préparés, les bouteilles débouchées, les cadeaux emballés et les alliances forgées… Tout allait être parfait.
Mais à la dernière minute… Traag s’approcha de Tetram. Celui-ci tenait compagnie au pauvre Rince qui supportait depuis de longues minutes le regard de T’es Trop Bu. - Dis, Tetram, je pourrais te voir une minute ? - Bien sûr. Qu’est-ce qui ne va pas ? - Quoi ? Mais comment… - Facile… tout va bien et rien ne cloche. Tout le monde sait qu’avec Fitz, Ford et Mortimus au même endroit, il faut s’attendre à des mauvais coups. - Et bien tu fais erreur, le problème ne vient pas d’eux mais d’Hermes. Il ne pourra pas venir célébrer le mariage. Tetram prit une jolie teinte grise, qui vira au rouge rapidement. - SI MA FILLE NE SE MARIE PAS AUJOURD’HUI… - Ecoute, je n’y suis pour rien. Le problème c’est que je n’ai personne d’autre. Tu aurais une idée ? - Le mariage est dans trois heures… Tetram alla à grands pas à la taverne pour se changer. Sans donner plus de réponse à Traag. Natura vint voir Traag pour lui demander la raison de ce départ, Traag reprit un peu de son flegme de diplomate pour la rassurer. Il en profita pour se convaincre qu’il avait la situation en main et que tout allait bien se passer. Tetram reprit ses vêtements de voyage usés et courut. Vite et loin. L’idée lui était venue facilement et cela lui plaisait. Encore fallait-il que son plan marche… Il dévala les pentes à grande vitesse, ne rencontrant personne. Les animaux se terraient à des centaines de mètres à la ronde, les oiseaux se cachaient parmis les nuages, tous s’écartèrent de son chemin. Même le vieux bandit des grands chemins qui logeait dans un bosquet près de la route ne tenta pas de lui voler sa bourse. Ce vieux Scion était en quelques sortes l’attraction de Sigdil… parfois une bonne âme se laissée « voler » sa bourse pour lui permettre de survivre. Le géant courrait trop vite pour tenir la distance, heureusement il n’allait pas très loin… Le camp de l’AGIR n’était qu’à une quinzaine de kilomètres de Sigdil. C ‘est à bout de souffle que Tetram passa devant les gardes, leur signalant rapidement qu’il n’y avait rien de grave. Mastok était assis avec les Gardiens élémentaires, discutant du bon vieux temps lorsque le géant se présenta devant lui, attirant des regards curieux. Tetram demanda à son chef, son ami, s’il pouvait venir officialiser le mariage. C’est avec joie que Mastok accepta. Il ne pouvait refuser l’honneur qui lui était fait. De retour à Sigdil… Mastok bénit le mariage et tout se passa comme prévu… Nul ne saurait que le mariage avait faillit être annulé, ou du moins repoussé… Tetram se sentait l’âme d’un héros. Des images, rien que des images… La jolie robe verte, telle une tache d’aquarelle se fondant au bleu du ciel. Un homme, tout sourire, paré d’une veste et d’une ceinture de cuir. Les deux s’avancent, porté par les chants des oiseaux, sous le regard de tout Sigdil. Leurs vœux prononcés, ils s’embrassent, mêlant leur vie, leur amour. Toute une vie qui se prépare, Un poids qui s’enlève. Le géant voit se construire une famille devant ses yeux. L’image de ses parents lui revient. Ses parents ne seront pas là quand il se mariera… s’il se marie un jour. Il avait déjà trop d’attaches, trop de choses à perdre. Il regrettait presque sa liberté de nomade… Mais Sigdil était un rêve inébranlable et cette pensée le réconforta. Cette petite elfe qui l’avait adopté, qui lui survivrait des siècles… « Idril mon unique enfant. » Ni les sons, ni les mots ne seront gravés dans la mémoire du géant, Seuls resteront les éclats dans les yeux des mariés et les couleurs chatoyantes. Les décorations, robes et fleurs, fixant les couleurs automnales dans un somptueux tableau. Le ciel pur et les rayons dansants…Une journée parfaite. Tetram se sentait un peu confus. Il venait de trouver un certain réconfort à penser qu’Idril ne serait jamais seule, qu’il y aurait toujours quelqu’un pour veiller sur elle. En même temps, il avait peur qu’elle ne se détache peu à peu de lui. Mais il ne montra rien. Il apprécia le moment, laissant ces pensées pour le lendemain. La cérémonie fut agrémentée par l’apparition d’une lutine, facétieuse mais pas méchante. Le dîner fût servit rapidement et le dessert gardé pour le lendemain… les mariés étant pressés de se retrouver enfin seuls et au calme après tous ces préparatifs et la tension qui en découle. Tetram et T’es trop bu se retrouvèrent à l’auberge, autour d’une chope, sans prononcer un seul mot. Ils ressentaient la même chose et tout deux se comprenaient… |