Na' et Syo | |
Topic visité 131 fois Dernière réponse le 26/01/2006 à 15:00 |
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C’est sous un soleil crépitant de flammes que la fourmi besogneuse s’agitait sous les épis de céréales. Si petite, si besogneuse pendant que d’autres s’amusaient, bien plus grands :
- Dis Donc, Na, avance! Une limace serait plus rapide que toi! - Oh! Cesse de râler petit barbare! Rÿxà plongea la main dans sa poche et empoigna les quelques cailloux qu’elle trimbalait toujours avec elle. Lorsqu’elle les emprisonna de ses mains et souffla une petite incantation, la jeune femme sentit les pierres s’agiter, s’animer. Syonien n’avait pas la langue dans sa poche et durant le monologue interminable qu’il avait l’habitude de faire chaque jour, même heure, son amie eût l’idée tortueuse de glisser les roches à l’intérieur de son chandail et continua, l’air de rien, à le suivre sans rechigner. Mais elle ne put faire autre qu’exploser de rire alors que l’adolescent se tortillait de tout bord tout côté, pleurant tellement il riait sous les chatouilles des petits êtres rugueux. Au bout de quelques minutes, il s’était mis à crier presque : - Na arrête ça! S’il te plaît! Arrête ça ou je le fais venir! C’est à ce moment que la jeune sauvage perdit son sourire. Du haut de ses seize ans elle allait au devant du danger, dite téméraire. Pour la jeune fille la peur de l’ennemi n’existait pas, car l’unique imprudence était de mettre ses proches en rogne. Si ses opposants bluffaient, pas les gens qu’elle connaissait bien. C’était sa seule crainte : la trahison. Ne lui a-t-on pas toujours répété qu’il n’existait pire ennemi que celui qui ralliait ses côtés et connaissait mœurs et aptitudes? Syonien toutefois ne l’aurait pas fait pour la blesser; pourtant tout de suite Rÿxà passa la main face au dos de l’homme sauvage et les cailloux se rematérialisèrent sur sa paume. - Aha! Tu vois que tu abandonnes vite!...Tu veux aller te baigner? - Oh… Je sais pas, je préfèrerais faire la bronzette! Depuis ces quelques temps passés à l’ombre je suis très pâle, on me croirait maladive… - Allez! Tu bronzeras mieux avec l’eau, c’est connu, en attendant… Akelaïn enleva sa chemise et courut vers l’eau, y plongea, pour ensuite en prendre dans ses mains et en jeter à la figure de Na’Rÿxà. - C’est aussi très connu que les chats n’aiment pas l’eau! Elle s’approcha de l’eau et y trempa la patte… La main, avant d’être tirée par Syonien. Quand on y pensait bien, les deux jeunes gens, il n’y avait pas à redire, se complétaient en tous points. Syonien était d’un an le cadet de Na, ce qui n’impliquait pas une grande différence dans leurs raisonnements respectifs. Ils n’étaient pas de la même famille, mais se connaissaient depuis leur plus jeune âge, de la couche au départ de la maison. Complices, l’homme sauvage démontrait une fougue démentielle tandis qu’elle donnait figure d’un ange. Aujourd’hui dans les champs, demain à la mer, ils vivaient au jour le jour et voguaient au gré du vent. Leur dernier aller à la ville datait de la journée précédente. En Luminae une vie bien agitée parcourait la place depuis quelques jours. On s’organisait, on cultivait, on récoltait. Une troupe peu à peu s’agrandissait. À travers toute la ville on parlait des Disciples de Gaïa. Côte à côte, Rÿxà avait fermement tenu la main de Syonien et s’était occupée à admirer la ville et ses alentours. La jeune fille prenait un malin plaisir à observer tout ce qui se passait autour d’elle et respirer le bon air. Décidément, elle n’était pas une fille de ville. En tous cas, d’après ce qu’ils avaient eu l’occasion de voir auparavant des cités des hommes. Ceux-ci n’avaient qu’un seul mot à la bouche : modernisation! En conséquences, leurs villages regorgeaient de nouveautés, mais d’une telle cacophonie. Luminae, quant à elle, avait paru supportable aux yeux des deux compagnons de part l’ambiance qui y régnait. Les habitants se faisaient discrets et si certains marchands tourmentaient le silence des sentiers, la cité n’en restait pas moins magnifique. Cette grande distinction entre les agglomérations des hommes se trouvait là. Les sauvages vivaient directement en contact avec la terre, avec la nature : ils en étaient son âme. C’est d’ailleurs perchée du haut d’un arbre qu’une oratrice avait invité les citoyens à se grouper autour d’elle. Syonien et Na’Rÿxà s’était approchés, mais déjà l’adolescent s’était jeté à deux pieds dans les embrouilles : - Dis donc l'ancêtre, tu voudrais toi qu'on te vol le produit de ton dur labeur? Tu réfléchis pas? Si c’était toi qu’on volait je parie que tu serais le premier à te plaindre. En plus y’a déjà un projet de loi tout beau tout propre, tu l'as lu? Ahh ces vieux et leurs "mais non, y’a pas de loi, c'est pas écrit patati patata"...Et puis quoi encore, ils pensent tout savoir! Le jeune homme sauvage avait mimé les paroles d’Anmor Sparrow. L’homme avait riposté mais Syonien, de ne jamais manquer une réplique : - Pff m'en fous de toutes façons t'es dépassé, arrête ton hypocrisie, t’es même pas capable d'être crédible "cher..." patati patata. Voler en Luminaë ça sert à rien vu que si tu commences, tout le monde se croira permis et tout le monde se volera l'un l'autre. Conséquences: on fera rien d'autre que voler et rien n'avancera. C'est moins fatiguant de voler que de travailler, gros fade va. Réfléchis un peu plus loin que le profit à court terme, ton profit personnel. Et encore tu te crois simplement plus fort que d'autres… C'est beau les rêves mais si tu voles, tu te feras voler par quelqu'un de plus habile. Faire la loi soi-même c'est ridicule. Le seul truc qui fonctionne c'est l'apitoiement, et de faire comprendre que les richesses sont ailleurs, j'ai vu une gamine plus jeune que moi encore se faire voler, et on lui à rendu ses biens. La pitié, les voleurs ont un coeur et sont fait de chair AHAHA Mais t'as raison, vole! Vole! AHAHA Il avait jeté un œil vers Na’. - Désolé... Lorsqu'elle entendit l'homme sauvage délivrer sa pensée, elle eût peine à retenir son ricanement et ses joues prirent une teinte rosée. Elle lui jeta une bourrade et d'un coup de coude amical l'envoya valser, le sourire aux lèvres. - Chuuut… Mais tais-toi, jeune inconscient! Qu'est-ce que c'est que ces manières, franchement! Rÿxà avait un air faussement fâché. - Et ne m'appelle pas Na, tu sais très bien que je déteste ça! Ne pouvant se contenir davantage, elle rit de bon coeur et souffla à l'oreille de son ami: - Bien joué! Alors qu’elle y repensait, là, au bord de l’eau, cela l’amusait d’autant plus et son jeune ami n’avait pas compris l’objet de son ricanement qui rompit le silence de leur petite bronzette au soleil. La baignade avait été bonne et bien arrosée. Rÿxá avait émis un miaulement bestial à sa rencontre avec l’eau, mais avait vite fait de rendre la pareille à cet écervelé doublé d’un petit pois dans la tête et avait failli noyer Syonien pour l’avoir fait tomber à l’eau. Un repos bien mérité avant de reprendre la route! Tout se passait bien jusque là, mais c’était sans compter sur les évènements qui allaient se dérouler. C’était à prévoir vu l’avancé des nains dans la lisière au sud de la forêt. Les négociations avaient mal tourné ou n’avaient pas tourné du tout. Et c’est en lançant des dards que les hommes sauvages avaient répliqué aux coups de haches. Ils avaient décidés de chasser les « nabots » de leur forêt. Le peuple sauvage avait été rappelé afin de protéger la cité des soi-disant envahisseurs. C’est avec les pieds lourds que Syonien et son amie prirent la route du sud est à travers la forêt. Le voyage était différent à présent la gaieté n’était plus de mise et c’était le ventre noué qu’Akelaïn marchait à présent. - Na… J’ai mal au ventre! - Fallait pas manger ces algues au bord de la plage, je te l’avais dit! Il sourit à la remarque de Rÿxà, puis il fut pris d’un fou rire. - Ça va mieux, ne t’inquiète pas… Mais t’es toujours aussi lente! Ils arrivèrent rapidement à l’ouest des bois près du fleuve Gaïa, entendant déjà les échos de la bataille. Ils n’étaient pas pressés car apparemment les nains avaient déjà été repoussés et leur présence n’était plus nécessaire. - Alors tu vas te décider à me montrer tes jolies jambes ou tu vas mouiller tes pantalons pour traverser? Le jeune homme sauvage avait traversé le cours d’eau en courant et criait debout sur l’autre rive. Elle rougit légèrement mais ne voulant pas paraître bête elle lança : - Toujours à chialer! Pire qu'une fille! Attends un peu que je sois de l'autre côté, tu vas voir ce que tu vas voi...AHHHHHHHHHHHHHHHHH Une grosse araignée s’était perchée sur l’épaule de la jeune fille, elle s’approchait dangereusement du visage de la sauvage. - Alors on est moins courageuse hein! D’un geste il fit grossir l’araignée, puis voyant son amie devenir toute blanche, il fit disparaître l’illusion dans une gerbe de fumée. Il adorait ajouter cet effet inutile à ses illusions, il trouvait ça plus spectaculaire. - T’es content? Syo se retourna ouvrant grand les yeux de surprise; il ne l’avait pas vue arriver, ni elle ni son poing en pleine figure qui le projeta dans l’eau. - AHAHAHA, fit elle pour imiter le rire de son compagnon, puis elle se jeta dessus comme une furie. - Attention tu vas te mouiller petite peste! … Quelques heures plus tard. - Atchiiiiiiii -AHAHA, c’est Gaïa qui t’a punie tiens! Tu devrais enlever tes vêtements, tu vas prendre froid, fit il en souriant - Ah non tu vas pas commencer! enchérit-elle Le silence s’était installé pendant la nuit, les deux comparses étaient trop fatigués pour continuer à se disputer. Ils s’étaient fabriqués un nid de fortune. Fabriquer était un grand mot pour une couche de mousse qu’ils avaient aidé à pousser le long du tronc d’un solide chêne. Un de chaque côté pour ne pas avoir à subir les grimaces l’un de l’autre. Cette nuit était plutôt fraîche, Syo décida donc de se métamorphoser, la jeune fille restait constamment sous la forme d’une dryade. Dans ses petits airs d’artiste, Na’ privilégiait souvent l’originalité à la confusion de l’esprit avec la réalité. En animorphe qu’elle était, l’apparence que Rÿxà préférait prendre se voyait comme un chat, un gros chat, peut-être un lynx. Son pelage reflétait le bleu du ciel et se rayait de traits eut-on dit magenta. Sa forme mi-chat, mi-humaine ne lui soustrayait pas sa longue chevelure rosée qu’elle aimait à faire voleter au vent lors de ses courses folles à travers champs et forêts. Affamée du rose, elle portait également de fins vêtements, soient un haut débardeur qui laissait facilement entrevoir le duvet de son ventre plat et une jupe de même teinte quelque peu écourtichée qui toutefois procurait la couverture et chaleur idéale à ses convenances. Cette métamorphose n’en était pas moins dépourvue d’une grâce féline sans équivoque et la jeune fille répugnait alors les puces qu’Akelaïn menaçait de lui transmettre lorsqu’il se grattait… Syonien quant à lui arborait une fourrure grise bien chaude et tachetée de noire, un nez légèrement allongé noir également et des canines terrifiantes qui débordaient de sa lèvre inférieure. Sous cette forme il ne pouvait se tenir debout et se déplaçait à quatre pattes car contrairement à sa compagne de voyage, il n’avait pas l’habitude de rester ainsi, préférant se pavaner fièrement avec sa longue tresse rouge. Seul le sourire moqueur trahissait la véritable identité de la bête qui se confondait avec celui d’une hyène. Les mains recroquevillées sur ses genoux, il contemplait ses griffes qu’il avait si fièrement limée par la pensée et s’imaginait déjà avec quelle facilité il aurait pu entailler les nains, mais tenir cet avatar lui demandait beaucoup d’énergie et il tomba rapidement de sommeil. Les bruits incessants et curieux de la forêt pendant la nuit n’ont jamais fini d’amplifier les sensations bizarres et de fournir aux êtres dotés d’une conscience de quoi se retourner sous les étoiles. Le lendemain de pareil ténèbre, on se sent toujours un peu mal, le repos n’était pas au goût du jour… ou plutôt de ce genre de nuits. Le jeune homme sauvage qui avait repris son aspect normal était contrairement à ses habitudes très taciturne. -Quelque chose ne va pas? -Eh bien, je sais pas comment te le dire, fit-il en souriant timidement et se grattant le crâne. Mais je me suis proposé à la candidature de conseiller. Il le dit si rapidement que la demoiselle mit du temps à comprendre et puis… - AHAHA! À d’autres, ça ne prend pas! Tu sais je ne t’en veux pas pour hier, c’est pas la peine de… En voyant la mine déconfite de son ami, Na’Rÿxà cessa de parler et baissa les bras. - Pfffff! Elle se frappa le front. Pourquoi t’as fait ça? T’es débile ou quoi? T’avais dit que tu n’aurais jamais à faire à ces choses, qu’ils étaient tous vieux et pourris, prêts à s’effondrer au moindre claquement de doigt ou souffle un peu fort. - J’ai jamais dit ça… commença t’il. Enfin peut-être que si, mais vois-tu, j’en ai marre de les voir rien faire, de s’apitoyer sur leur sort. Ils foutent rien de leurs vies… Ils ne s’amusent même pas, on dirait des statues qui attendent qu’on les détruise. J’aimerais les secouer un peu. - De toute façon, ils ne voteront jamais pour toi, ils ne sont pas fous. Elle avait prononcé ses paroles dans le but de se rassurer elle-même mais sans y croire vraiment. Elle savait que Syonien pouvait être convaincant, elle en avait fait les frais quelques fois, l’entraînant dans des combines impossibles, tout cela était-il fini? - Ne t’inquiète pas, on se verra souvent, tu restes la personne que je préfère embêter… Ça ne risque pas de changer, fit-il avec un sourire jusqu’aux oreilles, comme si il avait compris la détresse de celle qu’il appelait « Na pour l’embêter ». - Oui c’est ça… Tu crois vraiment que t’auras le temps? Tout ça va te monter à la tête. Mais on verra, tu reviendras en rampant vers moi AHAHAHA na… finit elle d’un rire narquois. Il y avait bon espoir quand la jeune fille prenait ce ton c’était qu’elle était prête à pardonner. - Mais ne croit pas que je vais voter pour toi, je suis pas folle moi, je ne te voudrais pour rien au monde comme conseiller, j’aurais trop peur de tes décisions, espèce de petit barbare! C’est qu’il mordrait l’animal. Mais enfin on va mettre les chances de ton côté vient je vais te préparer un peu pour ton discours tu ne vas quand même pas te présenter comme ça? D’un an plus âgée que Syonien, il arrivait parfois à Rÿxà de se prendre pour la mère de ce dernier. Elle le gourmandait régulièrement quand il faisait le pitre et exubérait le monde. Elle le soignait quand après une de ses folles aventures il finissait au bas d’une colline, dont la descente fut un peu trop rapide. C’était rare quand elle le prenait dans ses bras car leurs rapports restaient toujours amicaux sans atteindre les limites de l’affection. Mais ils s’appréciaient énormément. Toujours est-il que quand on leurs disait qu’ils finiraient ensemble, ils répondaient tous les deux en cœur. - NAN MAIS ÇA VA PAS LA TÊTE??... |
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J'aime beaucoup!
Le ton est très léger, et en même temps on voit quand même qu'il y a du travail dessous. J'espère qu'on auras droit à la suite des aventures de Na' et Syo'. |