Rêve rémanent | |
Topic visité 205 fois Dernière réponse le 04/05/2006 à 13:51 |
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Assis sur ma paillasse, les genoux entre mes bras, je ressasse ce même rêve qui viens encore de m’éveiller. J’ai du déjà le faire un bon millier de fois, et ce matin le temps semble être sur la même longueur d’onde que moi. Un orage d’éclairs stériles et sans pluie, charge l’air d’électricité et tente de faire par flashs interposés, la lumière sur mes songes.
Le même rêve, oui, malgré le temps qui passe, les scènes sont identiques et le rythme et la cadence jamais ne changent. L’éclat de trois voix me tire de mes rêveries. J’ouvre les yeux et les laisse s’habituer un instant à la pénombre environnante. Les voix qui m’ont éveillé, sont plus tempérées à présent. Une femme et deux hommes, l’un plus posé à la voix plus sure avec les ans. Une couverture m’entoure de sa bulle de chaleur, et un souffle régulier baigne ma peau de ses effluves. Un visage d’enfant me fait face, les paupières closes, la bouche entrouverte, les cheveux épars. La vision de ses traits me calme et m’apaise, mes paupières se font lourde, la commissure de mes lèvres s’étire, j’oublie les voix et sombre dans le néant. La voix féminine me tire une nouvelle fois de mes songes, mais cette fois un trait lumineux frappe l’arrière de mon crâne et enflamme la chevelure de l’enfant qui me fait face. Seulement deux voix résonnent, celle de l’homme plus mûr emploie un ton plus ferme pour répondre à chaque éclat de voix féminine, et ne me laisse pas repartir vers mes rêves. Doucement je me glisse hors de la couverture, en évitant de réveiller la petite fille étendue avec moi. Pourquoi une petite fille ? Je ne sais pas l’expliquer mais à ce moment là j’en suis sûr. Mes pieds rencontrent un sol froid et se crispent. Mes pas se font machinalement vers la porte et sans heurt. Le bruit d’une autre porte, celle vers laquelle je me dirige vacille, et la seconde voix masculine refait son apparition. Enfin mes doigts touchent le bois rugueux de la porte et la tire vers moi. La lumière agresse mes rétines et mes lèvres murmurent un « Maman ! » dans un silence soudain. Une ombre s’accroupit devant moi, soulageant mes yeux, et me chuchote un « Elidyr, il te faut dormir ! ». La voix et les bras qui me soulèvent sont sans conteste masculins et jeunes. Il me repose sur le lit, et avant de m’envelopper dans une couverture me glisse une bague au doigt, le chat dans la paume de ma main. Le geste me semble familier et a le don de m’apaiser immédiatement. Le néant revient. Mon troisième semi-réveil, se fait sous la fraîcheur de lèvres délicatement parfumées. Je quitte des bras à la tendresse muette, pour la sécurité tranquille et ferme de membres plus robustes et d’un torse plus large. Je serre avec plus d’insistance l’objet dans ma main. Puis plus rien jusqu’à ce que je me réveille en sursaut. Les premiers temps, mon retour à la réalité se faisait au milieu de pleurs et de cris, et toujours je trouvais en face de moi le visage calme et patient de mon grand-père. Sans jamais un mot de trop il me calmait et sa seule présence me rassurait. Ce rêve ou ce cauchemar, tout dépend de comment on le prend, me remplit chaque fois d’effroi et de questions. Mais quelle que soit l’énigme qu’il contient, il a sa part de vérité, cette chevalière dans sa bourse de cuir, qui ne me quitte jamais. A l’intérieur deux noms se font face Azerwal et Leigh. Bien sûr les ans ont prélevé leur due sur les traits de Riess de Hasting, mon grand-père, mais son regard n’a jamais pris une ride. Jour après jour il m’a élevé à sa façon, éludant mes questions, m’enseignant des valeurs qui aujourd’hui me sont chères, et m’apprenant un drôle de jeu où il est un expert. J’ai pas mal de coups de retard, mais j’ai aussi appris à garder certains atouts pour plus tard. En un peu plus de vingt ans il faut bien que les leçons se retiennent. Ainsi je suis persuadé d’être son petit-fils, ses yeux ne mentent pas, et le fils de sa fille pour être exact, car sinon mon nom ne se limiterait pas à Elidyr. Je suis certain qu’il est au courant pour la chevalière, peu de choses lui sont inconnues quant elles l’approchent de près, mais il attendra que je joue moi-même cette carte. Un éclair plus vif le sort de ses réflexions. Mais allons voir comment se passe ton tournoi mon très cher Riess ! Elidyr se lève avec fluidité, et après un brin de toilette, s’habille en gestes rapides. Juste au moment de passer la porte de la chambre, son visage se radoucit, cachant sa détermination sous les traits du visage d’un jeune voyageur heureux de parcourir le monde. Et c’est ainsi qu’il pénétra dans la salle commune pour manger un morceau avant de reprendre sa route. Elidyr
Personne n'est si jeune qu'il ne puisse mourir demain, alors rien n'a plus de valeur qu'aujourd'hui. Et les étoiles à leur tour, comme torches funèbres, font les funérailles du jour. |
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( Toujours aussi plaisant à lire. Encore ! ^^ ) |
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La salle était occupée par une quinzaine de personnes, des voyageurs et commerçants ambulants pour la plupart, mais les plus bruyants d’entre eux étaient les trois paladins assis autour d’une table et qui semblaient débattre sur lequel des trois serait le futur vainqueur d’un tournoi ambulant.
Si c’est celui que j’ai croisé, je crains qu’il ne faille prendre votre mal en patience mes jolis. Il n’avait pas l’air de prendre de l’avancement. Pensais-je en ne pouvant retenir un sourire en coin. En attendant c’était le postérieur de Vinitia une des deux serveuses, qui faisait les frais de leurs fanfaronnades. Elle semblait y être habituée, mais pour avoir vu des gars un peu trop entreprenants sortir de l’auberge sans toucher le seuil de l’établissement, ces trois là ne devaient pas franchir certaines limites. Détournant mon attention de la scène, j'allais jusqu’au comptoir et son propriétaire. Un homme replet et souvent assez jovial, qui maintenait avec virtuosité un climat somme toute agréable au sein de son établissement. Il faut dire que loin de tout mur d’enceinte et avec un passage de plusieurs races différentes il devait user de tact et non de force. Bonjour maître Hinemyr ! Bien l’b’jour jeune Elidyr ! Ca t’y bien dormi ? Comme toujours ! Que me proposez-vous pour me donner des forces avant la route ? Pain de seigle, jambon maison, pommes, et un vin aux épices ! Parfait, avec un broc d’eau et des fruits secs, si ce n’est pas trop vous demander ? J’t’ai d’jà dit qu’pour toi y avait jamais d’ problème ! Après quoi le petit homme se mis à aboyer vers les cuisines une suite de plats et de commandes pour satisfaire les ventres de ses clients. Les gens rentraient peu à peu avec la montée de l’astre diurne, si bien que quand je fus prêt à partir la salle était vraiment bruyante et presque une quarantaine de personnes s’était réparties entre les tables avec comme attraction des nains qui buvaient bière sur bières et un groupe d’humain étrangement silencieux. j'appelais Hinemyr et lui déposais la somme du pour le gîte et le couvert au fond de la paume. Tsssss mais j’tai dis que le log’ment c’était pour moi ! Non, non, je vous en pris, le jour où je serai sans le sous vous me garderai un petit place au coin de l’âtre. Grand nigaud va, qu’avec ton travail d’écritaille, tu m’paierais déjà bien assez. D’ailleurs hier soir t’as oublié ça ! Avec une agilité toujours aussi étonnante, le tenancier sorti un feuillet d’un petit placard derrière le comptoir, et le déposa devant moi. C’était sans conteste mon écriture, et la relecture des quelques lignes me fit sourire. Folie des temps nouveaux et anciens, folie de la vie Liant les êtres à loisir et déchirant les âmes Œuvrant pour vous satisfaire à l’envie Resserrant les liens comme les fils d’une trame Evadez-vous filles et fils du lointain Ne vous retournez pas sur les errances Courez plein d’énergie vers les lendemains Ecoutez votre cœur et cultivez l’espérance. Je ne sais si j’y trouverai une suite ! Tu m’ferras la causette, à ton prochain p’ssage ! Hinemyr me fit un clin d’œil et me tendit une main rugueuse et robuste, que je serrai avec confiance. On t’a mis de quoi pas mourir de fin dans ta besace, bonne route. Merci, et au plaisir ! Je saluai une dernière fois l’homme puis sorti vers la fraîcheur du matin. Le petit bourg était parfaitement réveillé et des enfants courraient dans la rue. Je les regardais un petit moment, laissant un autre de mes rêves revenir à la surface, enfin c’était plus un instant de rêve plus qu’autre chose. Il entendait sa propre voix rebondir sur un panneau de bois Sept, huit, neuf, quatorze, dix ! Puis la lumière se faisait, alors qu’il tournait sur lui-même. Les pieds d’une table et de chaises lui faisaient face, et une porte emplie de lumière lui faisait face. Il s’élançait vers elle, et débouchait dans un océan de verdure. Le tissu d’une longue robe arrivait de par sa droite, un rire cristallin sortant de derrière. Il courut vers elle et en faisait le tour pour découvrir une cascade de cheveux de feu et des yeux d’ambre et d’or cuivré qui après un instant de surprise laissaient place à une impression rieuse. Doucement les enfants ! Oui maman ! Deux voix étonnamment proche faisaient la réponse et sonnaient invariablement la fin de ce court rêve. Un soupir et sourire en même temps puis je reprie ma route vers la mer Elidyr
Personne n'est si jeune qu'il ne puisse mourir demain, alors rien n'a plus de valeur qu'aujourd'hui. Et les étoiles à leur tour, comme torches funèbres, font les funérailles du jour. |