Legends of Olympia : La Ballade des Mémoires - Conte de princesse
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Conte de princesse
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Dernière réponse le 30/09/2010 à 10:10

elfe Par Ambre  le 30/09/2010 à 10:10

Mon reflet tremble un peu. Dans cette boutique de vêtements du centre-ville, j'ai voulu essayer une robe. Elle est verte, belle et très très longue. La plupart des Elfes Nobles de la Cour portent ce genre de robes, belles et très très longues. Pour l'occasion, j'ai attaché mes cheveux en chignon. On voit mieux mon cou. Et mon collier. La pierre d'ambre se loge au dessus de ma poitrine. La robe est légèrement décolletée, je me suis forcée. Le tissu est très doux, la vendeuse m'a dit :

- Celle-ci est très finement ouvragée, vous allez adorer.

Il y a quelques broderies au fil d'or aussi. La robe se resserre au niveau de ma taille, sur le haut de mes hanches et tombe à terre. Tant mieux, je peux être pieds nus. Je ne peux pas me voir de dos, mais j'imagine. Et je souris. On dirait une grande dame.

Je sais que je l'avais déjà dit avant, mais je change beaucoup ces derniers temps. Mais c'est bizarre. Parce qu'il y a des jours où je repense à mon ancienne vie, un pincement au cœur. Tant de choses ont changé autour de moi, il fallait que je fasse de même. Je mange à ma faim. Je ne vole plus dans les magasins. Je ne cours plus dans les rues, poursuivies par des gardes. Je me suis même fait un nom, ou plutôt un prénom. Sans le vouloir. Des inconnus me reconnaissent. Des gens me sourient. Et à l'extérieur de Na'helli, lorsque je travaille, des Forestiers comptent sur moi.

Le Chien n'a pas pu entrer dans le magasin, je lui ai demandé de m'attendre devant. Je me dépêche de payer la robe et je sors. Il ne peut pas comprendre tout ça, je lui explique quand même.

- Tu sais, Le Chien, on me prend trop souvent pour une petite Elfe. Mais j'ai recompté mon âge plusieurs fois et je suis un peu grande maintenant. C'est sûr, je ne suis pas une vieille comme tous ceux qui disent qu'ils ont cinq cents, six cents ans, je pense qu'ils exagèrent un peu en plus, mais je ne suis plus une petite Elfe. Il ne faut plus que les gens me voient comme une gamine. Je ne veux plus qu'on me tutoie sans me connaître. Sauf la Reine, elle, elle a le droit. Et Gaver aussi, il a l'air gentil. Tu crois qu'ils ont des enfants ? J'veux dire, des jeunes ? Je me demande comment ça doit être la vie, quand notre maman c'est la Reine.

Je jette un coup d'œil au Chien pour voir sa réponse.

- Oui, tu as raison, je suis sûre qu'ils n'ont même pas le droit de sortir de chez eux. Ça se trouve, ils passent leurs journées enfermés à faire de la musique ou du dessin, ou alors ils écrivent …

- Ah oui, peut-être aussi. Mais ce serait triste non ? Tu te vois, toi, regarder toute la ville depuis là-haut, sans pouvoir sortir ?

Je me tais après cette phrase. Avec mon paquet sous le bras, je continue d'avancer. Ce serait ...

Quand j'étais petite, c'est-à-dire il y a longtemps, je lisais beaucoup de livres. J'aimais particulièrement les contes de fées, bien qu'il n'y ait pas toujours de fées dedans. C'étaient plutôt des contes de princesses du coup. Parmi mes préférés, il y avait cette histoire, d'une jeune princesse, très jeune, qui vivait dans un royaume très lointain. Sa mère, la reine, s'était endormie depuis très longtemps et le roi était profondément triste. Il n'avait plus qu'elle de qui s'occuper et pour être sûr de ne pas la perdre, il lui offrait tout ce qu'elle désirait. Elle était couverte de cadeaux somptueux, portait de belles robes, de magnifiques bijoux. Elle était la plus élégante des princesses. Mais un jour, la princesse demanda :

- Papa. Allons dehors, nous promener.
- N'as-tu donc point tout ce dont tu as besoin ici ?

Et la princesse, pour ne pas vexer son père, n'insista pas.
Et pour ne pas la perdre, le roi fit se développer une copie d'un jardin public au cœur du château. Tout était là, les jeux, les cabanes dans les arbres, les oiseaux, tout. Mais il n'y avait aucun autre enfant. Et tout autour se trouvait l'enceinte du château. Quelques semaines passèrent avant que la princesse ne redemande :

- Papa. Allons dehors, nous promener.
- Y a t-il encore quelque chose qui te manque ?

Et la princesse, pour ne pas froisser son père, n'insista pas.
Et pour ne pas la perdre, le roi aménagea la chambre de sa fille dans la plus haute tour dont il disposait. De grandes fenêtres laissaient passer la lumière, une lucarne avait même été construire au-dessus de son lit, pour que le soir venu, la princesse puisse contempler la nuit et son spectacle. Le mieux était encore dehors. Par sa fenêtre, la princesse entendait les cris et les rires des enfants. En se penchant, elle pouvait même parfois les apercevoir. Quelques semaines passèrent et la princesse demanda à nouveau :

- Papa. Allons dehors, nous promener.

Le roi ne sût quoi répondre, alors, simplement :

- Demain.

La princesse partit dormir aussitôt, son rêve allait se réaliser. Demain, elle sentirait le vent dans ses cheveux pendant qu'elle jouerait à tous ces jeux qu'elle a appris à force de les voir d'en haut. Avec tous les autres enfants, demain, elle serait dehors. Hélas, pendant la nuit, le roi fit venir de puissants magiciens qui verrouillèrent la porte de la chambre de la princesse. Au petit matin, elle comprit qu'elle était prisonnière. De sa chambre, de sa tour, de l'amour de son père. Condamnée à regarder la vie de haut, à travers sa fenêtre.


Les légendes ne disent pas comment l'histoire finit. On trouve plusieurs fins alternatives. Certains disent qu'elle est tombée par la fenêtre en trop se penchant pour voir son rêve. D'autres disent que c'est en voulant descendre le long du mur qu'elle serait tombée. Quelques optimistes comme moi pensent qu'elle a pu s'en sortir avec l'aide de quelqu'un et qu'elle a fui dans la forêt, attendant le jour où sa mère se réveillerait.

- C'est triste, hein ?

- On y va ?

Le Chien pencha la tête sur le côté, il fait ça quand il ne comprend pas ce que je cherche à faire.

- Tu n'as qu'à me suivre!


La route pour le Palais est très simple. Malgré la foule et les arbres tout autour de nous, le bâtiment royal s'impose. Les immenses portes en bas, gardées en permanence, sont grandes ouvertes. Il y a quelques administrations au rez-de-chaussée. Mais ce n'est pas ce qui m'intéresse pour le moment. Je lève la tête. Le donjon s'élève très haut. Au plus haut, une fenêtre est toujours ouverte.

- Regarde là-haut.

Je montre la fenêtre du doigt en même temps.

- Tu vois ? C'est comme dans le conte. Si on pouvait entrer, je suis sûre qu'on verrait que c'est une chambre de princesse. Mais on pourra jamais monter, alors autant oublier ça.

Je fixe longuement la fenêtre, le donjon, la cour tout autour. J'enfouis cette image dans ma mémoire et repart. À peine arrivés chez moi (oui parce que j'ai même un chez moi maintenant), j'attrape de quoi gribouiller et reproduis grossièrement ce que j'ai vu. J'ai jamais été très douée pour le dessin, mais je m'y retrouve.

- Regarde, Le Chien. Si la princesse était tombée de sa fenêtre …

Le Chien soupire.

- Quoi ?! Nan mais on suppose qu'elle habitait ici! Bon, si elle était tombée d'ici, elle serait tombée ...là!

J'appuie mon doigt sur l'un des balcons du donjon.

- Ça n'a aucun sens hein ? Je continue de penser qu'elle n'a pas pu tomber. Elle s'est enfuie, ça ne fait aucun doute.

J'avais dit ça avec le ton le plus sûr de moi possible.

- Mais qu'est-ce qu'elle attend pour revenir ? Et puis, il est où le Roi ?